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| La parole de Grenth | |
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Cordélia Von Hoefer
Messages : 226 Date d'inscription : 27/04/2008
| Sujet: La parole de Grenth Sam 30 Aoû - 11:08 | |
| 173ème jour, saison du Phénix, 10XX AE
Archipel du Sorcier, Ile de la Tribu de Themiskyra.
Dans un soupir de soulagement, le seigneur Régent Autolycus s’adossa à son confortable siège, posant sa plume à coté d’une pile de parchemins fraîchement signés et scellés. Il ne fut guère surpris, en jetant un bref coup d’œil à la fenêtre en vis-à-vis, de trouver les étoiles familières de la Faux de Grenth à la place du Soleil. Une fois de plus, le Conseil royal s’était montrée interminablement long et fastidieux. Si cela tenait qu’à lui, il l’aurait aboli, remplacé par des réunions plus fréquentes en petits comités d’experts. Mais hélas, les agendas surchargés des ministres, conseillers et généraux n’autorisaient guère que ces sinistres sessions de Marathon bureaucratique. Ce qui l’horripilait le plus, ce n’est pas tant ce pensum en lui-même, mais surtout qu’il fusse aussi imposé à la reine. Elle se tenait vaillante et alerte à ses côtés, mais les petits signes visibles à ses yeux d’époux attentif ne le trompaient guère : les débats juridiques, les arguties légales, les bilans comptables et les inventaires d’intendance l’avaient proprement épuisée. « Et je ne suis guère mieux loti… Par Thémis, c’en est enfin fini pour ce mois ci ! » Pensa-t-il. C’est donc avec un sourire, qu’il écouta Krystéhal prononçait les mots fatidiques : « Au nom de la Tribu de Themiskyra et devant les Dieux de l’Olympe, je proclames solennellement ce Conseil achevé. » Un soupir de soulagement quasi unanime répondit à cette phrase de clôture. Prenant subrepticement la main de son épouse sous la table, Autolycus prit à son tour la parole, en souriant : « Vous avez une voix enchanteresse, ma reine, mais elle est d’autant plus irrésistible lorsque vous prononcez des paroles aussi douces à nos oreilles. » Elle lui sourit en retour. Il continua : « Mes chers amis, vous revoir tous est normalement pour Nous la plus grandes des joies, mais j’ai le regret de vous annoncer que nous nous retrouverons de nouveau dans cette pièce dans un mois. Néanmoins, que nous ne rencontrerons plus, je l’espères, un tel imbroglio sur un contrat de livraison de farine ! » Les conseillers se mirent à rire à l’évocation de ce maudit litige commercial qui leurs avaient coûté cinq heures, plusieurs migraines et deux crises de nerfs. « Je ne sais pas pourquoi », fit posément le général Maedhros, le sourire aux lèvres, «mais je suis prêt à parier six fragments d’obsidienne contre une écaille de mergouille que mon prochain cauchemar sera à base de contrats synallagmatiques, et de forclusions …» « Tu as oublié les Exequatur et les clauses léonines… » ajouta le régent, faisant éclater de rire l’audience. Les membres du Conseil saluèrent la reine, puis sortir avec son royal qui les accompagna sur le perron du palais royal. Autolycus revint quelques instants plus tard. « Ma douce amie, je suis ravi que… Oh, vous êtes encore là ? Vous vous étiez assoupi ? » S’exclama le Régent, mi-souriant, mi-interrogatif, s’apercevant qu’à l’insu de tous, un des ministres était resté tranquillement à sa place. « Ce n’est pas vraiment dans mon habitude, votre majesté, » fit Cordélia, son visage restant de marbre. Elle se tenait de façon avachie dans sa large chaise, non pas par manque d’éducation, mais par nécessité ; son ventre rebondi par huit mois de grossesse ne lui laissait guère d’autres choix. « Souhaitez vous que l’on vous mande une escorte ? Émit la reine, souriante. Il n’est guère raisonnable dans votre état de vous laisser sans aide, surtout que vous en avez pour un petit bout de chemin… - Ne vous inquiétez pas. Alfred m’attend. - Au fait, je n’ai jamais compris, demanda le régent, pourquoi vous l’affubliez vous d’une tenue, comment dire, aussi… ? - Grotesque ? , suggéra Cordélia. - C’est le moins qu’on puisse dire. - Parce que je ne tiens guère à provoquer des mouvements de panique à chaque fois que je l’envoie faire des courses.En outre, en cas d’éventuel agression, je m’offre un avantage en incitant mes adversaires à le sous-estimer. - Hum… - Et puis, toutes les occasions de rire sont bonnes à prendre, n’est ce pas ? Le régent et la reine sourirent. « Ce n’est pas faux. Dites moi, reprit Krystéhal, que nous vaut alors votre présence prolongée ? - Et bien, je ne voudrais absolument pas abuser ni de votre temps ni de votre magnanimité, ma reine, mais j’aimerais vous demander une insigne faveur. - Bien entendu, Cordélia, nous vous écoutons. La jeune femme tendit au couple royal un parchemin soigneusement enroulé. Autolycus le déroula, jetant un léger coup d’œil. - On dirait un article de loi ? - - C’est en fait un décret, entièrement rédigé, auquel il ne manque que votre sceau. En fait, je souhaiterais que vous le promulguiez. - Mais pourquoi ne pas l’avoir proposé en session entière tout à l’heure ? - J’ai besoin de garder le secret, notamment envers … Enfin, lisez le, vous comprendrez… » Krystéhal et Autolycus se penchèrent sur le décret, qui tenait en deux minces articles. Ils ne purent s’empêcher de montrer leur stupéfaction, se jetant des regards d’interrogations alors qu’ils le relirent plusieurs fois. « Ma chère Cordélia, fit au bout d’un long silence la reine, est ce que vous comprenez les implications de ce texte ? - En effet, et il a été rédigé dans cette optique de les provoquer. Le plus dur fut circonscrire son champ d’application au plus petit nombre de personnes possibles. - Oui, je l’ai remarqué, mais pourquoi vouloir ainsi vous pénalisez, vous et … ? -J’aimerais sincèrement vous le révéler, votre Altesse, mais je dois impérativement garder le silence sur mes intentions. Je puis vous promettre solennellement que cela n’a et n’aura aucune conséquence sur la vie de notre Tribu. » Les traits de la jeune femme restaient hiératiques, et pourtant le couple royal pouvait sentir sourdre du désespoir dans son regard. « C’est… une question de vie et de mort ». Krystéhal et Autolycus s’échangèrent un long regard, puis Autolycus prit de nouveau sa plume, et parapha le décret de sa belle signature avant que la reine n’appose son sceau. Le parchemin prit place au milieu de la pile. Cordélia se leva, et esquissa un début de révérence, avant de s’approcher de la sortie. « Merci beaucoup, ma reine, mon seigneur. - J’espère sincèrement que vous savez ce que vous faites, Cordélia, fit Autolycus. - Moi aussi, seigneur Régent, sourit tristement l’envoûteuse en sortant. Moi aussi, j’espères savoir ce que je fais ». Le couple royal resta silencieusement, puis, simultanément, posément, ils s’approchèrent de la fenêtre, regardant la place devant le palais. « Je l’ai rarement vu aussi accablée, murmura songeuse Krystéhal. - Ma reine, je crains qu’elle tente d’échapper par tout moyen à une funeste toile tissée par les Parques… - Qu’est ce qui vous suggère cela ? » Ils virent la jeune femme descendre les marches de marbre blanc, avant qu’elle ne s’installe dans une chaise à porteurs soutenue par une massive silhouette vêtu de noir. Aussitôt, la chaise se mit à s’éloigner rapidement, en direction du petit village portuaire de l’île. « Mon intuition, et surtout le fait qu’elle éprouve le besoin expresse de nous demander ce type de services. Je crains le pire pour elle… - J’espère que vos craintes se révéleront infondés… - Moi aussi, ma Reine, moi aussi. » | |
| | | Cordélia Von Hoefer
Messages : 226 Date d'inscription : 27/04/2008
| Sujet: Re: La parole de Grenth Sam 30 Aoû - 11:17 | |
| HUIT MOIS AUPARAVANT…
280 ème jour, saison du Colosse, 10XX-1 AE
Roche de l’Augure, Désert d’Elona.
Le soleil était à son zénith sur le sable ocre et surchauffé du désert Elonien. Un léger souffle torride lui infligeait des infiltrations de sable dans sa robe, mais Cordélia n’en n’avait cure. Seule, elle avançait à pas décidés, ne s’étant pas arrêté une seule fois depuis son débarquement à XXXXX. Ni la chaleur étouffante du jour ni la froideur glaciale de la nuit, rien ne l’empêcherait d’atteindre son but. Sa détermination étanchait sa soif et sa faim, sa volonté inébranlable maintenait fatigue et monstres errants comme nuisances mineures. Elle obtiendra ce qu’elle voulait, et rien ni personne ne l’en empêchera ! Trois et trois nuits de voyage, et elle était déjà arrivée à sa destination : la roche de l’Augure, le lieu où elle s’était Elevée, là où les Dieux gardent contact avec le monde et accordent parfois audience aux mortels. « Ils ont intérêt à préparer le thé et les petits fours, j’arrives » murmura t-elle, le visage de pierre, tout à sa rage de vaincre. Toujours à grandes enjambées, elle s’approcha de la falaise, récitant la prière qu’elle avait apprise autrefois au moment de son Elévation, avançant sur les roches glyphées idoines. Elle ne ralentit même pas lorsque, comme prévu, un pan de falaise s’écroula ; faisant fi des rochers chutant, ignorant le danger, elle grimpa le long escalier menant à l’Antichambre divine. Une fois dans la salle monumentale, elle s’arrêta, et s’assit à l’entrée en position du lotus, se concentrant au maximum. Elle ne fit pas attention à l’arrivée du Gardien, sachant pertinemment que son intrusion provoquerait son arrivé. Il n’était pas seul. Ils étaient cinq, immenses, hiératiques. Les cinq silhouettes humanoïdes formaient un demi-cercle silencieux ; leurs sombres corps fuligineux semblaient s’évaporer en d’obscures volutes. Une voix s’éleva, puissante et solennelle, une voix une et pourtant multiple, comme prononcé par un chœur de milliers de choristes à l’unisson. SORTEZ MORTELLE. SI AUTREFOIS VOUS NOUS AVEZ VAINCU, VOTRE ACTUELLE PRESENCE EN CE LIEU N’A PAS ETE ECRITE. SORTEZ, OU SOUFFREZ DES CONSEQUENCES DE VOTRE FOLIE. Puis, sans autre avertissement, les cinq silhouettes se métamorphosèrent lentement, reprenant à l’identique les traits de Cordélia, ses yeux gris, ses cheveux blonds, sa tenue en soie azura, sa cape frappée de la croix Themiskyrienne. Elle sentit l’attaque de leurs sortilèges, les mêmes que ceux qu’elles avaient préparés pour réduire en cendre tout opposition sur son chemin, les carbonisant si ils lançaient des sorts ou leurs faisant partager la douleur infligée au combat. Stoïquement, elle les encaissa, maintenant sa concentration mentale à son paroxysme. Elle savait qu’en restant immobile, elle s’en sortirait sans dommage. Voyant que Cordélia ne bougeait toujours pas, les cinq Doppelgangers avancèrent d’un même pas, armant leurs lourdes haches de cérémonies au dessus de leurs têtes, prêts à donner le coup de grâce. VOUS N’ESQUIVEREZ PAS VOTRE FUNESTE DESTIN, MORTELLE ! Comme prévu. Son minutage était parfait, elle avait achevé son exercice de méditation, réveillant ses pouvoirs psychiques, que même ces Gardiens Divins ne pouvaient copier, et leurs premières malédictions empathiques venaient de s'évanouir. Le rire de Cordélia emplit l’antichambre, alors qu’elle se relevait à présent. Sa tenue avait changée : elle arborait à présent une veste et une jupe noire, une chemise blanche et une cravate verte maintenu par une épingle dorée. Juchée sur des stilletos, ses yeux étaient dissimulés par des lunettes noires, et son sourire carnassier était parfaitement clair. Tout comme l’étrange objet qu’elle portait à deux mains, à hauteur des hanches. Approximativement de forme parallélépipédique, la chose se terminait par six longs tubes maintenu en cercle autour d’un axe ; une étrange et large chaîne contenant des cylindres métalliques ogivales pendait de l’appareil, pour remonter dans le dos de l’envoûteuse. Les Gardiens s’arrêtèrent, reprenant d’un seul coup leurs formes vaporeuses, pour essayer de copier le nouvel aspect de Cordélia, sans succès. Celle-ci mis l’objet en joue, se calant fermement sur ses jambes, et l’empoignant fermement par une poignée au dessus, et en maintenant l’index droit crispé sur un petit levier. Les tubes se mirent à tourner, de plus en plus vite, dans un sifflement strident. « Et vous, esquivez ça ! » ricana la jeune femme. Et l’enfer se déchaîna. Dans un bruit de tonnerre, ce qui se révéla être une arme se mit à cracher de ses tubes rotatifs des centaines de projectiles à haute vélocité. Ils avaient une force d’impact terrible, transperçant les Gardiens en miaulant, creusaient des impacts dans les murs et le sol en ricochant. Une pluie de petites enveloppes métalliques en cuivre tombait dru au pied d’une Cordélia prise d’un fou rire méphistophélique. En moins d’une quinzaine de secondes, les Gardiens avaient été réduits en de vulgaires lambeaux de chair sombre et poussiéreuse, mais il s’écoula encore un long moment de destruction pure avant que la jeune femme ne cesse de tirer, faute de munitions. Le silence retomba brutalement dans l’antichambre, alors que les dernières douilles tintaient en tombant au sol. Quelques morceaux de plâtre chutant troublèrent à peine ce calme. Cordélia reprit lentement son apparence normale et son souffle, lâchant au sol le minigun encore fumant. « Désolé, Gardien, » s’adressant aux cendres qu’elle piétinait allégrement, « je n’ai ni le temps ni l’envie d’être sportif. Ouvres moi la Porte.» Soudain, le sol s’ouvrit sous ses pieds, et elle chut dans un cri de surprise. « NOUS AUSSI, NOUS N'AVONS PLUS ENVIE D’ETRE SPORTIF ». La salle repris alors son apparence normale, immaculée, inaltérée, comme si rien ne s'y était jamais passé. | |
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